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Lemaitre, Nesbo, Crais, Mankell : rois du polar !

Dans le train, dans l’avion, à la maison, je lis. Je lis beaucoup et, en ce moment, des polars. Je ne peux pas dire que j’ai été passionné par la rentrée littéraire 2011. Je me suis attaqué à une vingtaine d’ouvrages. La plupart, je les ai refermés avant d’en avoir lu la moitié. Restait la sélection du Prix Landerneau dont je vous ai parlé. Alors, je me suis jeté sur le roman Noir, le roman policier, les thrillers. Beaucoup de déchets aussi. Mais je me suis fait plaisir avec les 5 titres suivants. Je recommande :  -   « Alex », Pierre Lemaitre (Albin Michel) Alex, c’est l’héroïne, une femme qui se fait enlever et séquestrer. On souffre pour elle. On prend parti, on s’investit dans une enquête exaltante, très rythmée. On fait la connaissance du commandant Camille Verhoeven (au masculin !). Un grand prototype d’anti-héros solitaire. Il ne faut pas que je vous raconte le dénouement. Mais le personnage du flic est vraiment intéressant. Je cite : « …sa vie n’appartenait plus qu’à lui, il en est le seul détenteur et le seul bénéficiaire. Quand on est devenu le personnage principal de sa propre vie, ça n’est plus intéressant. Ce qui le fait souffrir…ce n’est pas seulement le complexe idiot de survivant, c’est de se sentir assujetti à une telle banalité. » On ne coupe pas aux classiques ficelles du genre, avec une bonne louche d’invraisemblance. Mais avec ce troisième opus, Pierre Lemaitre devrait faire recette. -   « Le léopard », Jo Nesbo (Gallimard) Ne soyez pas effrayé par l’épaisseur du pavé. Il n’y a pas de temps mort, même si on vit encore dans le pas d’un lonesome policeman. Harry Hole est assez ravagé. L’aventure, la dope, la guerre des polices, il a dû tout connaître dans ses vies précédentes. Mais des serial killers opérant d’Oslo au Congo, ça ne se rencontre pas tous les jours. Le crime, c’est comme la bonne cuisine, plus c’est complexe, plus c’est diablement excitant. On rentre dans « Le léopard » comme on descend dans une cave de jazz. Dans la pénombre, on devine plus les personnages qu’on ne les voit. Pas sûr qu’ils aient tant que ça d’épaisseur. Mais on les approche, on les sent, on les comprend (un peu comme chez Fred Vargas). Alors tant pis, si les derniers feuillets sont nuls à l’image d’une mauvaise série B. Jo Nesbo nous livre une partition de country-blues. Avec même cette petite touche à la Bogart : « et tu sais où je veux qu’on m’enterre, moi…dans le parc devant l’hôtel de police ! Pas parce que j’adore la police ou parce que j’ai été partisan de ce que l’on appelle « l’esprit de corps ». Au contraire, j’ai craché sur la fausse loyauté des gens vis-à-vis de l’institution, cette camaraderie incestueuse uniquement fondée sur l’idée que les gens auront peut-être besoin qu’on leur rende service dans la tourmente…Mais la police, c’est tout ce que j’ai, c’est ma tribu. » C’est pas beau ? -   « A l’ombre du mal », Robert Crais (Pocket) « Quand on vit à trois mille bornes de sa copine, on parle à son chat. » Vous l’avez deviné, Elvis Cole est un autre single man. Professionnellement, le détective a comme partenaire une sorte de baby-sitter ex-mercenaire. Que du classique, sans sexe ni amourette, et une intrigue quasi écrite d’avance. Et pourtant, on se laisse prendre. On parcourt Los Angeles dans tous les sens, on savoure les paysages de canyon depuis la colline d’Hollywood et si, question écriture, c’est pas du Michael Connelly, on découvre dans ce polar une dizaine de personnages bien troussés tel celui-ci : « un homme fluet aux yeux chassieux trahissant une propension à trop boire tous les soirs sans le regretter le matin. » -   « L’homme inquiet », Henning Mankell (Seuil) J’ai gardé le meilleur pour la fin. De Mankell, j’ai tout lu. Et pas simplement les enquêtes de son héros, Kurt Wallander. L’intrigue ? Une affaire de sous-marin russe qui pénètre dans les eaux territoriales suédoises. Des soupçons d’espionnage. Une enquête qui s’apparente à une remontée dans l’histoire, aux ambiguïtés des comportements dans les pays « neutres ». Et des douleurs d’autant plus fortes qu’elles vous guident vers des familles proches… Là-haut, dans ces contrées froides, tout le monde se connaît, a un ami, un grand-oncle qui… Donc, c’est une fresque sociale. Et chacun ne se révèle qu’en se heurtant à l’histoire de l’autre. Si Mankell est à son meilleur, c’est qu’il y a ici confusion totale entre la narration, le récit et la biographie du héros vieillissant. Un portrait touchant, pathétique. D’autant plus qu’on connaît la fin. C’est un commentaire de Marie-Laure Delorme dans le JDD qui a suscité mon envie d’acheter ce livre : « Kurt Wallander aime faire ricocher des galets à la surface de l’eau jusqu’à ce qu’ils coulent à pic. On va ainsi le voir disparaître. » Cette histoire a produit sur moi une sorte de thérapie. A 59 ans (bientôt) et alors que j’aimais ça, sur les plages en hiver, j’ai définitivement arrêté de faire des ricochets.

2 Commentaires

Salut Mel!
Pour les ricochets rien de mieux que les belons;ça revient un peu plus cher mais ainsi on leur rend la liberté et le risque d'assommer un poisson ou un crabe est alors réduit.
Salut Mel!
Pour les ricochets rien de mieux que les belons;ça revient un peu plus cher mais ainsi on leur rend la liberté et le risque d'assommer un poisson ou un crabe est alors réduit.

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