
C’est la question que pose implicitement Dominique Wolton, fin explorateur et critique impénitent de la société médiatique.
Je partage sa réponse : « Il y a quelque chose de pudibond à penser qu’un journaliste fait mieux son travail si personne ne connaît ses opinions. » (Le Parisien, 17/02). Je rajouterais cette question :
« Masquer ses opinions, n’est-ce pas la plus hypocrite des manipulations ».
1) Il y a d’abord eu le cas, scandaleux, de la mise sous cloche de Béatrice Schonberg du fait de son mariage avec un ministre en exercice, Jean-Louis Borloo ; puis celui de Marie Drucker dont les paparazzi s’apprêtaient à révéler qu’elle était « pote » avec François Baroin.
Punies d’être « femmes de »…ou encore parce qu’on les soupçonnerait d’être « incapables de distinguer leur vie privée de leur métier de journaliste » ? Ridicule !
Ou alors, c’est faire l’aveu de leur incompétence et il ne faut plus les embaucher du tout !
On peut comprendre qu’elles ne puissent interviewer leur conjoint (encore que le spectacle pût être charmant, télégéniquement parlant : « Dis-moi, chéri, quand vas-tu offrir un statut aux intermittents du spectacle qui te filment en ce moment… ? »). Qu’on leur interdise un plateau politique, c’est tout simplement de la lâcheté (éviter toute critique, ne pas avoir à assumer, à se justifier, à défendre la probité de ses salariés…).
2) La marginalisation d’Alain Duhamel a beau être élégamment expliquée (« c’est d’un commun accord… »), elle pue l’hypocrisie la plus pénible à entendre. Outre qu’il s’est fait piéger sur le Net, en croyant participer à une réunion privée, personne en France ne doute de son engagement du côté de la démocratie chrétienne.
On se rappelle qu’il avait « omis » de parler de Ségolène Royal dans son dernier ouvrage sur les prétendants à l’Elysée. Pas un pékin de gauche n’imagine que ce bon garçon, estampillé Sciences Po classics, puisse voter Buffet, Bové ou Le Pen. L’homme a signé tellement d’éditoriaux et de commentaires, de Libé à France 2, que ses opinions peuvent être connues de tous, y compris des candidats qui perdent ainsi un rare intervieweur qui les respecte et les aime.
En témoigne la réaction peinée, quasi affectueuse, de François Hollande ou de José Bové.
3)
Qui donc a mis cette idée dans la tête des PDG des chaînes TV « qu’un journaliste doit être neutre ». N’y a-t-il pas confusion entre la neutralité nécessaire à l’animation des débats et celle, irréaliste, des journalistes eux-mêmes.
Que tous les journalistes politiques, « neutres de France », lèvent la main ! Certainement pas vous, les Jean-François Kahn, Serge July, Jean-Pierre Elkabbach, PPDA ! On ne vous croirait pas. Et d’ailleurs, on ne vous le demande pas.
Alors, va-t-on exclure les journalistes de l’Huma quand il s’agira d’interroger Marie-George Buffet. Ou mettre sur la touche Nicolas Beytout, rédacteur en chef du Figaro, face à Nicolas Sarkozy. Et va-t-on interdire d’antenne tous les rédacteurs de journaux qui, de Libération à La Croix ou à Charlie Hebdo, ont justement choisi…de pratiquer un journalisme d’opinion, voire d’engagement ?
Pour tout vous dire, je trouve qu’en ce moment,
la jurisprudence du « politiquement correct » nous conduit vers une sorte de « dictature larvaire du principe de précaution » qu’un Wells ou un Huxley n’aurait pu imaginer.
Entendre un directeur de rédaction dire « qu’il ne faut pas donner prise à une opinion qui soupçonnerait une collusion (du fait du lien avec un frère, autre Duhamel, en poste sur la chaîne)…c’est vraiment ne pas avoir d’estime de soi, ni de son métier. Quant à avoir des couilles… Qui veut-on leurrer avec ce genre de défausse. Hier soir, n’était-ce point le sieur Ambiel, ancien conseiller com de Jean-Pierre Raffarin qui mettait en scène le grand oral de Ségolène sur TF1 ? Insoupçonnable, lui aussi ?
C’est mépriser le peuple que de le flatter ainsi dans sa grégarité et son voyeurisme. C’est se mépriser, oui, en révélant cette incapacité à défendre à la fois la probité et l’engagement, la passion et le professionnalisme !
Personnellement, je trouve moins hypocrite, et surtout plus intéressant (plus objectif aussi) de savoir « d’où parle le camarade journaliste ». Je ne crois pas à la neutralité de gens compétents. C’est antinomique.
A l’heure où tous les médias audiovisuels exhortent à mettre en spectacle l’émotion plus que le raisonnement, n’est-il pas nécessaire, pour la démocratie, que nos propres jugements puissent être confrontés à ceux d’hommes, engagés, qui s’expriment avec pertinence, pédagogie et enthousiasme ? Personnellement, ce serait mon choix !
17 Commentaires
Je ne pense pas que Duhamel soit plus mauvais qu'un autre. Au contraire... Simplement, une autre forme de débats, plus proche, par exemple d'un blog, s'ouvre : il n'est pas rare de voir actuellement à 20h45, Arlette Chabaud ou PPDA recevoir un invité qui se présente aux élections présidentielles auquel les spectateurs devenus animateurs posent des questions concrètes. Le candidat à la présidentielle répond directement aux questions que lui posent l'électeur (chômeurs, salariés, cadres, patronnat). Peut-être un dialogue plus direct avec l'électeur s'imposait-il ?
Tchao M.E.L.
Concernant Alain Duhamel, son commentaire portait sur une analyse de la campagne au jour où il parlait, et il disait qu'à l'heure actuelle il voterait pour l'UDF car c'est eux qui avaient le projet le plus clair. Pour moi il s'agit plus d'une critique envers les autres partis qui ne font que des effets d'annonces sans rien de concret à la clé, mais en tout cas pas un choix ferme et définitif, ni une invitation aux autres à suivre son exemple.
Pour ce qui est de la presse, si ce linchage médiatique ne l'atteint pas c'est peut-etre parce qu'elle est victime du déclin de ses ventes au profit de la télévision et de la radio. De toute façon que ce soit Libération ou Le Figaro, chaque quotidien à son électorat de fidèle lecteur qui ne se laissera jamais convaincre de passer à l'ennemi.
L'idée de connaitre la couleur politique des journalistes n'est peut-etre pas mauvaise cela permettrait surement de mieux comprendre les projets de chacun sans aller jusqu'à la mise à mort. On peut imaginer qu'un journaliste remettent en question le projet sa faisabilité, au candidat de démontrer sa viabilité à toute épreuve justement. Cela nous sortirais peut-être enfin des discours pré-établis des directeurs de campagne.
En revanche on peut lancer une autre polémique sur le fait de détenir un poste de ministre qui peut favoriser son détenteur dans la campagne électorale présente. Je suis partagé. Profiter de déplacements ministériels pour faire campagne ne me semble pas très honnête ...
Olivier.
à la morale légale, là où celle-ci
ferait défaut.
La politique est l'art d'obtenir de
l'argent des riches et des suffrages
des pauvres, sous prétexte de les
protéger les uns des autres.
L'Appoggiature brève.
ami MEL devient PHILOSOPHE...
la démission de Besson semble pourtant etre un cri du coeur face a une horde d'incompétants, je ne suis pas de gauche et pourtant avoir une opposition digne de ce nom, serait un bienfait pour la république seulement, voila, a l'image de l'ensemble des blogs des conchieurs réunis les gens s'autorisent a penser, ce qui en soit pourrait etre ecxellent, mais dans la réalité se traduits par des bribes de phrases copiées collées et colportées, mélangeant propheties et politiques, commerces et droit divers, philosophies et raviolis, le tout avec la bénédition de benets environementaux sur fond de derive sectaires
Amen!
ce qu'il dit sans jouer son va-tout,
Bien sûr, il s'agit de François Bayrou.
Notre futur Président de la République.
Félicitations.
Concernant les promesses électorales , je reste méfiante et continue , y compris après les élections si ette injustice n'est abolie.
Il sagit des allocations familiales . merci de vous joindre à cet élan de solidarité et de me répondre . Une cliente du supermacher LECLERS à ST-GEOSMES HAUTE-MARNE cordialement FRANCINE LESSERTEUR DORMOY
Je ne comprends pas et je n'approuve pas ces polémiques à propos des journalistes (à l
je ne comprends pas et même je n'approuve pas les polémiques autour de la nécessaire neutralité des journalistes (notamment ceux du PAF).
Pourquoi ?
Parce que je pense, que les journalistes sont ni plus ni moins que des hommes et des femmes comme les autres. Ils ont certes, l'opportunité de par leurs fonctions de mettre en lumière, les idées de certains de nos concitoyens ou autres interviewés. Cependant, serait il intéressant de suivre une émission complètement asceptiséé ? Tels que peuvent l'être, les produits de variétés ou de complaisance que l'on nous sert, qui permettent aux artistes de faire leur "promo" !!
Bien sûr, un devoir de réserve du journaliste est nécessaire et doit faire partie de sa déonthologie. Pour autant, ne peut il pas, d'une façon modérée et avec respect, (comme ces journalistes le font d'ailleurs), remplir correctement ses fonctions ? Pourquoi faudrait il absolument faire partie d'une publication avec une étiquette notoire pour légitimement exprimer sa pensée, lorsqu'on est journaliste ?
La spectatrice que je suis, trouve très intéressant et enrichissant de suivre un débat ou une émission politique telles qu'on les voit en ce moment, animées par un professionnel dont je sais (plus ou moins) la sensibilité politique plus tôt que par un de ses collègues plus neutre. Je suis d'autant plus attentive à son professionnalisme.
Permettez moi de faire le parallèle suivant :au marché, on ne connait pas forcément les goûts du maraîcher en la matière et pourtant il sait vendre produits (ceux qu'il aime comme ceux qu'il n'aime pas)et de notre côté on sait les acheter. D'une part, car on a nos propre goûts et d'autre part, parce que c'est un PROFESSIONNEL qui exerce bien son métier.
Je crois que toute la différence réside dans le PROFESSIONNALISME de chacun.
Et si, je ne vous ai pas convaincu, vous avez toujours la possibilité de zaper, en bon professionnel de la consommation que nous sommes !!!
Les médias, tout en bloc, roulent pour le(s) même(s). Par là même, les opinions des journalistes ne sont que trop exprimées. Que gagnerait-on aujourd'hui en démocratie en France à les encourager à afficher plus clairement leurs opinions? En ont-ils une solide, d'ailleurs? La girouette tourne plus vite que le vent!
argentine