La culture, même au cimetière

Certains cimetières sont de véritables livres d’histoire. Celui du Père-Lachaise, celui de Montparnasse… Un peu partout en France, des tombes célèbres, de très vieilles et de plus récentes, attirent des milliers de visiteurs. La concession orthodoxe de Sainte-Geneviève-des-Bois regroupe les centaines de sépultures (on parle de 18 000 ?) portant principalement des noms de l’immigration russe. On y trouve des Romanov, des Tolstoï, des Kandinsky, des Poliakov ! Des soldats de Koltchak, d’Alexeiev, et d’autres grands noms de la lutte anti-léniniste. Parcourir les allées entre pins et cyprès est aussi un grand moment d’émotion. Sur la tombe du Prix Nobel Ivan Bounine, des lecteurs ont déposé une pomme, quelques fleurs, un mot replié qu’on se gardera bien d’ouvrir. Les enfants du cinéaste Tarkovski ont commandé pour leurs parents une pierre tombale en forme de roc. Aucune ostentation, mais juste cette impression de force et de solidité au milieu d’autres tombes plus frustres, quelquefois simples monticules de terre glaise surmontés d’une croix. Manifestement, c’est le même visiteur qui a laissé sur les tombes de Lifar et de Noureïev (superbe tapis de mosaïques) un œillet  blanc, discret, comme le sont d’ailleurs les autres signes de tendresse (icônes, statuaires) déposés ici ou là dans un des cimetières les plus visités de France. Etrangement, personne ne semble cependant avoir été interpellé par cette pierre tombale aux dates apparemment farfelues. A en croire l’inscription sur l’édifice, notre homme n’est pas encore mort, mais le décès est bien programmé ! Je suis allé voir sur Google. Le comédien « Lev Krougly » n’avait rien d’un plaisantin. Grande figure du cinéma et du théâtre russe, il est décédé l’année dernière. La plaque commémorative est donc erronée. Il aurait fallu graver « 17/11/10 ». Allez, y aura-t-il une bonne âme pour rectifier cette erreur !