
Sortie de l'euro : ça coûte combien en francs ?
Je l'affirme : aucun candidat, aucun président, qui fera la promesse d'un retour au franc, ne pourra la mettre en œuvre le temps de son mandat.
Les buralistes, les restaurateurs, les chauffeurs de taxis, les commerçants petits et grands devraient se rappeler au bon souvenir des politiques.
Ces professionnels pourraient leur dire qu'il a fallu plusieurs années pour passer à l'euro : se convaincre que ça va se passer à travers nos métiers, qu'on va devoir changer les factures, les tickets, acheter du nouveau matériel, des logiciels, appliquer un double affichage (qu'on commence seulement et 15 ans après !) à enlever discrètement.
Alors vous pensez bien, revenir au franc, comme ça, sur injonction d'un nouveau président ou même par volonté populaire (référendum), tu parles, ce ne sera pas demain la veille !
Retour au Franc
J'ai épluché les programmes. La plupart des souverainistes commencent à mettre en veilleuse cette question de l'euro. Le souverainisme par la monnaie, ça fait sens sur le papier ou dans les idées, mais tous les consommateurs et notamment les retraités, gardent encore le souvenir de 2001.
Seule Marine Le Pen (Le Monde vendredi et dans son meeting de Lyon hier) en a fait sa marque de fabrique.
Moi, je suis pour le débat, et il n'y a pas de débat tabou. Juste, il faut être responsable et concret. Marine Le Pen dit que sitôt élue "elle négociera" avec les Européens un "Frexit" à l'instar des Anglais et de leur Brexit, et qu'éventuellement elle proposera le retour du Franc par référendum.
La comparaison paraît éloquente sauf que les Anglais n'adhéraient pas à l'euro et les magasins britanniques n'auront pas à changer le rendu de monnaie.
En France, le passage à l'euro a coûté des dizaines voire des centaines de millions d'euros (formation, matériel, communication…). Les centres E.Leclerc, qui furent pionniers de cette pédagogie, en ont un sacré souvenir. Les ministres se précipitaient aux caisses devant les caméras. Mais la mémoire se perd.
Combien de taxis ou de restaurateurs se sont vus imposer des nouveaux matériels et ont dû subir la foudre des consommateurs qui dénonçaient une "inflation perçue".
Mesdames et Messieurs les conseillers des politiques, cette affaire ne concerne pas que la macro-économie. Je ne comprends pas que vous soyez à ce point hors sol.
Aucun candidat, aucun président, qui fera la promesse d'un retour au franc ne pourra la mettre en œuvre le temps de son mandat. Ce sera juste un cadeau (empoisonné) pour le successeur.
Effet sur le pouvoir d'achat
Il y a quand même beaucoup de légèreté dans toutes ces annonces, pour ne pas parler d'irresponsabilité. La gestion actuelle de l'euro est critiquable, on est d'accord. Mais se retrouver seuls, à côté d'une zone Sterling et d'une zone Euro-Mark (que Marine Le Pen cantonne à l'aire géographique de l'ancien Reich…), ça risque d'être une bonne baffe pour le pouvoir d'achat des Français.
Tout en entretenant le doute sur une possible dévaluation compétitive, on nous dit que le décrochage du Franc, versus l'Euro-Mark, favoriserait nos exportations (au passage, ce devrait être le cas aujourd'hui puisque l'euro est au plus bas vs. le dollar).
Moi j'aimerais que ces zélateurs du Franc assument l'effet indéniable sur la baisse de pouvoir d'achat des Français qui en résulterait. Les mêmes d'ailleurs n'hésitent pas à prôner dans le même temps, une taxe sur les importations de l'ordre de 3%, insuffisante pour changer les flux, mais plein pot pour le ticket de caisse.
Le retour de l'écu ?
Ah oui, j'oubliais ! Comme il faudra bien commercer entre Européens, on nous ressort l'écu, tantôt comme monnaie de compte, tantôt comme double monnaie.
L'écu, ça n'a jamais fonctionné.
Mais surtout, à l'heure d'internet, du développement de l'auto-entrepreneuriat, de l'ubérisation et du consommateur-entrepreneur, et alors que les flux de paiement n'ont jamais été aussi libres et rapides, cette segmentation (monnaie d'entreprises vs. monnaie de consommateurs) n'a aucun sens.
Il leur reste 3 mois pour revoir leur copie.
3 Commentaires
Alors que nous avançons dans la construction d'un bloc solide européen il faudrait remettre en question la monnaie européenne. Je perçois le Brexit est une chance pour l'euro et pour l'équilibre des accords entre les pays européens. Alors que nous allons entamer une transition énergétique sans précédent avec l'usage de moins de gaz et moins de pétrole qui aura intérêt à détruire l'Euro pour garder le monopole des échanges internationaux ou d'imposer sa monnaie aujourd'hui écartée? Nous devons serrez les coudes derrière notre monnaie unique pour construire le monde avec nos valeurs sinon, nous retomberons sous la tutelle d'une super puissance. Il y a certainement des éléments à modifier et il serait intéressant que vous nous entreteniez sur ce qui pourrait aller mieux et comment solidifier le système. Oui la construction européenne ne fait pas plaisir à tout le monde et surtout à nos concurrents! il faut je pense en avoir la certitude. Qu'en pensez vous?
Monsieur Leclerc n'avez vous pas remarqué à quel point les groupes allemands gagnent des parts de marché dans la distribution, depuis la création de l'euro?
Article qui mérite une attention particulière ! En effet l'euro vs dollar est un thermomètre pour les exports français. Cependant, contrairement à ce que pense Mme lepen, les produits d'exportation comme les voitures, ne rivalise pas avec l'Allemagne (BMW, Mercedes) mais avec des marques telles que ( hyundai, mazda) qui sur le marché américain par exemple, importe des milieux de gamme rivalisant avec nos milieux de gamme français ( Peugeot, Renault).
En clair, l'Allemagne tient un avantage concurrentiel sur une un marché de niche du luxe qui n'est que peu influé par le taux de change.
Il serait bon pour nos politiques d'échanger davantage avec nos entreprises pour avoir une idée plus fondée sur le sujet.