SOCIÉTÉ
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Emploi : qui veut encore du CPE ?
Il faut dire les choses comme elles sont ! Les chefs d’entreprises sont pour une plus grande flexibilité dans la conclusion comme dans le dénouement des contrats de travail. Mais la majorité ne veut pas, (ou ne veut plus) du CPE. Et personnellement, je rejoins ceux qui estiment que même remanié, amendé, ripoliné, le CPE ne mérite pas qu’on le défende mordicus, ni qu’à cause de lui, on mette le feu à la démocratie.
Contrairement au CNE, dont le concept répond à une vraie exigence (levée de certains freins à l’embauche des TPE et artisans), le CPE est un produit vérolé, en tout cas trop hybride, pour être compris par les salariés, et utilisé sans risque juridique par les entreprises.
1. Il revient à Laurence Parisot d’avoir, dès les prémices de cette affaire, tiré la sonnette d’alarme. Elle a refusé l’instrumentalisation du Medef, ce qui eut été encore bien plus nuisible que les « forcing » de Villepin. Elle a obligé le politique à assumer « la méthode », préservant ainsi la capacité de renouer le dialogue social. Elle a (en quelque sorte) évité qu’on ternisse encore un peu plus l’image de l’entreprise et des patrons, si mise à mal dans l’utilisation à tout crin du mot « précarité ». (Je dis ceci d’autant plus sincèrement que je n’adhère pas au Medef !).
2. Est-ce à dire que les patrons étaient tous contre l’idée du CPE ? Certainement pas. Contrairement à ce qu’on a dit ici ou là, la mesure n’a pas été concoctée dans la seule tête des énarques. A de multiple reprises, ces dix dernières années, j’ai vu nombre de patrons, à l’image d’un Dassault, d’un Bellon, pester contre les excès du CDI, et « l’impossibilité de licencier » « sans casse » pour l’entreprise.
La demande, que dis-je, la pression sur le politique était forte. Elle était d’ailleurs légitime. Et les syndicats faisaient l’autruche : « on ne touche pas aux acquis… ».
3. Mais pour autant qu’existait cette demande de caractère général, celle-ci n’était exclusive d’aucune autres mesures, d’ailleurs jugées prioritaires (abaissement des charges, amélioration des qualifications etc.…). L’idée d’en faire une mesure spécifiquement destinée aux jeunes était d’autant plus absurde qu’en terme de coût (qualification) ou d’ancienneté, ce n’est pas cette population qui rend les licenciements les plus délicats.
4. Aussi, ce qui nous gêne tous, dans cette affaire, ce sont les vices de fabrication, les erreurs de marketing et les mauvais arguments de vente qui font du CPE un mauvais produit.
Vice de fabrication ? Tout a été dit. Période d’essai trop longue, automaticité froide du licenciement…
Erreur de marketing ? A qui est destiné le CPE. Aux « jeunes des banlieues sous-qualifiés », « aux jeunes tout court » ? Autant la cible du CNE est claire, autant celle du CPE ne l’est pas. Pas étonnant que les diplômés se soient sentis visés.
Les arguments de vente ? Surfant en catastrophe sur les réactions populaires, les membres du gouvernement ont joué une partition tellement cacophonique qu’on s’est cru dans une partie de poker menteur :
Ex :
a) « Vous les gosses de riches, n’êtes pas concernés, pensez aux
jeunes défavorisés »
b) « Mais vous les diplômés, concevez quand même que le CPE c’est
mieux pour vous qu’un CDD ou qu’un de ces stages dont vous
dénoncez les abus. Etc…
5. Dans ce contexte, je ne m’étonne pas des résultats de l’enquête CEGOS, (La Lettre de l’Expansion du 3/04/06). Une majorité de patrons hésiterait à recourir au CPE, et 44% y renonceraient à coup sûr.
6. Le politique a fait semblant de ne pas entendre cette résistance patronale. Thierry Breton a cru devoir tancer les indélicats. L’Union des Patrons Artisans (UPA), a peur qu’on revienne sur le CNE… Mais finalement, à la suite de Laurence Parisot, le représentant le plus musclé du patronat, Denis
Gautier-Sauvagnac (UIMM) convient que le bâton est désormais merdeux.
7. Je l’ai dit ici. Les 500 chefs d’entreprise qui composent le mouvement Leclerc n’étaient pas demandeurs du CPE. (Les magasins du groupe emploient 85 000 salariés dont 91% en CDI). Nous sommes d’accord avec Laurence Parisot pour qu’on réfléchisse, dans la refonte du droit du travail, « aux motifs de rupture, à la période d’essai et plus généralement à la séparabilité de l’entreprise et de l’employé ».
Mais surtout, nous souhaitons qu’on s’attaque à tous les obstacles structurels qui freinent l’embauche, (revalorisation du travail manuel, filière courte de qualification, rapprochement école entreprise ...etc.).
Encore faut-il qu’on sorte du bourbier actuel. S’obstiner dans l’erreur du CPE, c’est se priver de toute possibilité de réforme avant longtemps dans ce pays.
18 Commentaires
dans les sites. Bonne visite.
Bien cordialement.
Il est évident que le CPE est grillé, les manifs massives compromettent même plus que son avenir ou son devenir.
Mais au delà du CPE, l'actualité internationale se durcit. Les pays du golf reprennent quelques essais nucléaires et le font savoir.
Tchao M.E.L.
Rassurez-vous MEL, les réformes seront bientôt à nouveau possible. Vu comme c'est partie, la droite va prendre une énorme claque au prochaines élections. Oui, je sais les élections sont encore loins, mais la rancoeur contre le mépris dont c'est faire preuve les libéreaux est profonde.
Dans mon entreprise, le nombre de salarié syndiqué est ridicul, pas plus de 2%. Pourtant nous avons fait grêve, du jamais vu. Je me demande si la droite mesure à quel point le CPE a été une erreur.
Les Unes de Charlie Hebdo sur http://unecharlie.populus.ch/
Je vous cite "les jeux de massacre d'autant plus faciles que personne ne se risque à répondre. Juste pour la posture, histoire de pouvoir dire qu'on fait toujours partie de la rébellion."
Les menaces de mort, dont ont été victimes les journalistes de C.H. lors de l'affaire des Caricatures de Mahomet prouve à quel point, le métier de journaliste à C.H. peut être plus dangereux qu'il n'y parait.
Les Unes de Charlie Hebdo sur http://unecharlie.populus.ch/
Le gouvernement à manqué d'intelligence sur ce coup,c'est vrai, mais je trouve déplorable que l'on exprime son désaccord pas des grèves et des manifs à répétition.
Il semblerait que les "jeunes" (et moins jeunes !) aient oublié le jeu de la démocratie, le mécontentement doit s'exprimer dans les urnes,et non pas en bloquant ceux qui travaillent, d'autant que la prochaine échéance electorale est proche.
Je ne comprendrais jamais cette mentalité francaise !
Cdt
"Refusons de subir", écrivais-tu en exergue à l'aube de 2006.Au-delà des slogans ( il ya même eu une galerie d'hypermarché hier à Toulouse envahie au cri de "nous voulons consommer"), c'est la saturation du sentiment de mépris, d'exclusion, qui s'expriment aujourd'hui chez beaucoup de français et pas seulement les étudiants.Manque de démocratie participative, de véritable statut de l'élu, de transparence, de lisibilité de la chose publique :la dictature de l'image, les "politiques de communication" outrancières ont amené un profond malaise. Où en est la dimension symbolique qui fait le lien partagé de toute société? Un contrat, CPE ou autre, est inconcevable sans une réelle justice unanimement reconnue pour démêler les conflits qui peuvent en naître. La flexibilité ponctuelle doit être compensée par un soutien fiable marquant une intégration continue dans la société : il n'y a pas de roseau vivant sans rhyzomes (voir Deleuze...).Le pays mais aussi le monde sont malades d'une idée de progrès qui brise les dignités humaines et , à mon avis, il y a urgence, même si des avancées significatives existent : commerce équitable, luttes contre les pollutions et l'intolérance, économies d'énergie, défenseurs des droits de l'homme et d'une répartition plus égale des richesses, de l'accès à l'eau et au logement...tout cela est bien mais reste insuffisant, ces avancées devraient être au coeur de la vie en société.
Féliciations encore pour votre Blog !
Et @bientôt
Jérôme
sur quotidien. Bien cordialement.
- le chomage des jeunes est un énorme probleme, qu'il faut traiter d'urgence
- le CPE en tant que solution non négociée et avec certaines mesures d'une portée symbolique forte (période d'essai + non justication des licenciements) etait au mieux mal vendu et au pire une provocation.
- dans la situation actuelle, toute initiative va être très compliquée même une fois réglé le chaos actuel.
Cela rappelle Claude Allegre, qui lui aussi a voulu attaquer un vrai probleme avec des vraies solutions mais une methode catastrophique... retardant énormément les évolutions nécessaires de l'Education Nationale...
ce Monsieur AVA reproche à
l'enseignement...
L'éducation, c'est autre chose, elle
est dispensée à la maison, par les
parents...
lE VRAI PROBLEME C EST QUE MAINTENANT JEUNE OU MOINS JEUNE QUI RECHERCHONS DU TRAVAIL SOMMES DEVENU DE LA VULGAIRE MARCHANDISE.
LES PATRONS ONT LE CHOIX. DIPLOMES OU NON JEUNE OU NON. BELLE OU NON BLANC OU NON.
JUSQU'OU IRA LA FRANCE? LE GOUVERNEMENT?
QUE LEUR CEP LEUR SOIT APPLIQUE. VILLEPIN N'A PAS FAIT SON TRAVAIL=LICIENCE.
pour aider les jeunes et moins jeune à trouver du travail il faudrait des gens COMPETENTS et des patrons INTELLIGENTS qui sachent donner la chance et transmettre leurs savoirs.
A BAS TOUS LES CONTRATS DE PRECARITE.
COURAGE AUX JEUNES ET TOUS LES CHOMEURS.
LIRE ET RIEN ENTENDRE,
EST COMME CHASSER ET NE RIEN PRENDRE.
Et aujourd'hui, un autre:
SI VEUT LE ROI, SI VEUT LA LOI.
Bien cordialement.
Personnellement, j’adhère souvent aux éditoriaux de Philippe Val, le rédacteur en chef de Charlie Hebdo. Je crois aux vertus de la satire, de l’humour, même quand ça râpe, ça dérange ou que ça polémique dur. Mais il est des combats qu’on mène à trop peu de frais. Ici, en Occident, nos journalistes sont tout de même bien moins menacés que dans ces dictatures où certains d’entre eux se retrouvent en prison ou morts. Le prix de la liberté n’est pas le même ici que là-bas. Avouez que c’est quand même cabotin que de défier le tyran à 6 000 km de sa citadelle.
Demandez donc ce que les Européens en poste dans les capitales musulmanes ont dû subir sans que d'ailleurs personne n'ait cherché à solliciter leur avis.
Oui, il y a ambiguïté sur le désir de réforme. Tout le monde parle de volonté de changement, mais personne ne veut prendre le risque de bouger. Mais ce n’est pas simplement un problème de mentalité. C’est aussi la révélation d’un déficit de pédagogie. Sur ce point, la responsabilité du politique et des intellectuels est dramatiquement forte.
Oui, il manque un réel espace de dialogue. Et de ce point de vue, il faut lever une confusion. Une démocratie, ce n’est pas l’anarchie, c’est un pouvoir qui s’assume, une décision qui se fait responsable, des erreurs qui sont sanctionnées... Mais la pratique du pouvoir nécessite qu’avant décision, on ait épuisé tous les termes du débat. C’est sans doute ce que tu appelles la démocratie participative. Tant qu’il s’agit de politique étrangère, de défense, ou même des principes macroéconomiques, on peut accepter ou se satisfaire du pouvoir des experts. Mais dès qu’il s’agit de parler santé, éducation, bien-être, carrière ou aménagement du territoire, force est de reconnaître qu’il n’existe pas de lieu de débat permanent, ni de pratique référendaire, ni même d’outil pédagogique et d’information accessible au plus grand nombre.