
Ce matin, vers 7h55, Nicolas Demorand (France Inter) m’interpellait à peu près en ces termes : « Est-ce que ça vous dérange, vous aussi, de voir un grand capitaine d’industrie, du secteur du luxe, proche du pouvoir, accaparer les deux fleurons de la presse économique française ? ».
Sur le fond, oui, je l’avoue…il y a quelque chose qui me dérange profondément dans le fait que ce soit de grandes entreprises, influentes sur le marché, qui deviennent propriétaires des principaux journaux français ! Cela en dit long sur les difficultés d’un secteur qui n’arrive pas à intéresser d’autres investisseurs… Une telle situation n'a rien d'inédit outre-Atlantique, mais nulle part ailleurs qu'en France, on ne trouve une telle concentration de magnats industriels dans la presse. Cela pose d'évidents problèmes d'éthique. Comment rédiger un article critique sur une firme détenue par l'actionnaire? Et peut-être encore plus difficile : comment s'exprimer sur les agissements d'une entreprise concurrente sans participer à ce qui pourrait être interprété comme un dénigrement ?
Mais ce n’est pas la raison principale pour laquelle j’ai signé le manifeste pour « garantir l’indépendance rédactionnelle des Echos ».
Je n’ai aucun procès à faire à Bernard Arnault particulièrement.
Je ne vois pas pourquoi on focaliserait l’attention sur lui alors que Bouygues, Dassault, Bolloré et Lagardère sont dans la même situation.
Si on aborde ce problème d'éthique, il faut le traiter de façon globale non discrimante à l'égard du patron de LWMH. Par exemple, en suscitant un débat parlementaire.
Je ne soutiens pas plus l’argument qui plaide pour la préférence à l'acheteur étranger. Cela ne change rien à l'affaire. Si c'est un fonds de pension anglo-saxon ou une veuve irlandaise, la garantie qu'il n'y ait pas de conflit d'intérêt est illusoire. L'investisseur a forcément aussi des participations dans les sociétés françaises. Et de toute façon, rien ne garantie un actionnariat stable.
Et puis, le problème principal est-il le statut de l'acquéreur ? Il faut vraiment avoir la mémoire courte : combien de candidats socialistes, et même de la droite nationale, ne se sont-ils pas privés de qualifier Les Echos de « journal du MEDEF, acquis à Sarkozy » ... alors qu’il était encore la propriété du groupe anglais Pearson !
Non, ce qui me choque dans cette affaire, c’est l’accaparement dans les mains d’un seul propriétaire des deux grands journaux économiques, hier encore concurrents. Les autorités de notre pays se targuent de vouloir garantir la diversité culturelle et le pluralisme des idées. De ce point de vue, l’information économique n’est pas neutre. Qu’on se rappelle les récentes querelles sur l’évaluation du pouvoir d’achat, du nombre de chômeurs, ou le chiffrage des programmes économiques des candidats. L’enjeu, ici, ce n’est pas simplement l’accès à l’information, c’est son objectivité, son degré de sincérité.
Dans tous les domaines économiques, le Conseil de la Concurrence ou la Commission Européenne sont intervenus pour empêcher la constitution de monopoles et pour que la concurrence puisse profiter aux usagers. C’est quand même un paradoxe que, s’agissant de la presse économique, personne n’ose poser très sérieusement les mêmes questions !
Et puis, au-delà des aspects économiques, il faut s’interroger plus fondamentalement sur le sort des hommes (journalistes et autres salariés). Transformation de La Tribune en site Web, fusion avec Les Echos ? Les discours sur l’avenir du journal La Tribune ont de ces petits airs d’hypocrisie qui ne sont vraiment pas supportables.
A qui fera-t-on croire qu’un même actionnaire gardera les deux équipes au feu ?
Oui, patron je suis, mais citoyen je reste. J'ai signé, aux côtés de Jacques Attali, Nicolas Baverez, Patrick Arthus, Jean-Noël Jeanneney, Jacques Delors ainsi qu'une centaine d'autres personnalités un manifeste pour témoigner "notre profond attachement à l'indépendance rédactionnelle" de ces titres.
Dans mon jeune temps, je fus pigiste et rêvais d’être reporter. J’ai toujours gardé un œil sur les médias (ils gardent d'ailleurs un oeil sur ce que je fais!!!).
Par passion, mais aussi par convictions politiques, je veux rester attentif à l’évolution d’un secteur qui, à l’heure de la concentration des pouvoirs, reste un des meilleurs remparts de la démocratie.
11 Commentaires
et le rôle du chevalier blanc, ça ne vous dirait pas ?
si vous faites ça, promis je vais faire mes courses chez Leclerc tous les samedis.
PS : sans aucun rapport avec le sujet précédent....
il manque une sous-rubrique "Egalité H/F" dans votre rubrique Société; le "Label Egalité", ça ne vous dirait pas ?
bon, je n'ai plus rien d'autres à vous vendre pour aujourd'hui (c'est le monde à l'envers, ce blog...)
Mais si on espère que cela change, il y a sans doute des chemins plus indiqués que le regroupement des deux grands titres entre les mains d'un seul grand patron français.
ça me plait pas specilement de te rentrer dans le lard mais c'est ce que je pense, j'espere me tromper
Merci pour tout !
J'ai entendu à la radio que vosus aviez donné une longue itw sur la TVA sociale. Malheureusement je n'ai pas pu acheter le journal en question.
Pouvez vous revenir sur votre position quant au fond?
Merci par avance.
Route de Charenton
18200 SAINT AMAND-MONTROND
Jacques Thomas représentant du collectif salarial du Centre E.Leclerc de Saint-Amand-Montrond (18200) lance un appel a l’aide à son président Monsieur Michel Edouard Leclerc.
Nous avons besoin de votre soutien pour défendre mes emplois (72) aujourd’hui menacés comme vous le savez.
C’est aussi que nous subissons l’acharnement de nos concurrents Carrefour et Intermarché.
Le consommateur est avec nous vu le contenu de deux livres d’or.
Monsieur le Sénateur-Maire,Serge Vinçon, vice président du Sénat, ainsi que de nombreux maires et conseillers généraux et municipaux organisent un rassemblement de soutien de notre cause : 72 emplois CDI plein temps menacés ainsi que la volonté de voir se maintenir l’enseigne E.LECLERC fondé par Monsieur votre père Edouard Leclerc et dont nous défendons les convictions tous les jours de 5 h à 19.30 h.
Votre présence à nos côtés le 29 septembre à 9 h 30 nous donnerait un élan et une force considérable, et nous aurions le sentiment de ne pas être abandonnés.
Merci de répondre favorablement à cet appel en détresse.
( un breton qui connaît la mer)
M.THOMAS Jacques
Votre discours est touchant LoL
"Nous avons besoin de votre soutien pour défendre mes emplois (72) aujourd’hui menacés comme vous le savez."
Menacé par quoi ? une eventuelle fermeture du magasin(souhaitée par beaucoup de vos salariés) ou le harcelement moral exercé chaque jours par Mr MAHON et vous même ?
Un employé qui vous subit tout les jours !
Respecter nous, nos vies privée, les lois du code du travail et payez nous à des dates régulières et on en reparlera !
cordialement ...
vivien.